Un article au poil ! Par la sexologue Milène Leroy.

Un puissant signal érotique est activé à la vue et à l’odeur des poils ! Les bulbes pileux constitués de multiples glandes apocrines empêchent l’évaporation et conservent ainsi les odeurs sexuelles. Que vous l’aimiez ou pas, il stimule la libido.

ALORS LE POIL, EXCITANT OU REBUTANT ?

L’envie de toucher un duvet est-elle tentante ? Est-ce un arôme qui éveille chez vous une attraction sexuelle ?

Les poils sont un avant-goût de l’acte sexuel. Visibles, ils sont, -tout comme la sensation nouvelle de toucher-, une des premières associations sens-sexe qui plait ou déplait. Avant même parfois de goûter à la peau, les poils mettent votre/vos partenaire(s) dans de bonnes ou de mauvaises dispositions érotiques. Par exemple, pour une fellation ou un cunnilingus, il n’est pas rare d’entendre qu’il est plus agréable de lécher un sexe glabre ou des lèvres épilées plutôt que d’embrasser une zone très poilue. Sans poil, les rapports bucco-génitaux sont souvent reconnus comme étant plus savoureux.

Au-delà du sens pratique et de l’esthétique, (il ne s’agit là que d’une affaire de goût), le poil est aussi un merveilleux émetteur de réactions non verbalisées. Le hérissement du poil met en évidence l’échange corporel, visuel, sonore ou encore gustatif qui a lieu. Est ce que vos effleurements, vos touchers plus appuyés, vos baisers, vos regards… vont créer le frisson ? Ouvrez l’œil, un corps poilu guidera votre approche qu’elle soit sensuelle, franche ou plus animale.

LA NEUTRALISATION DES SEXES PAR L’ÉPILATION

L’épilation est une mode, un rite de passage qui fait des femmes et des hommes, des objets modernes. Les normes sont culturelles et ancrées dans les mœurs. Crèmes, rasoirs, tondeuses, cires… tout est mis en œuvre pour que vos corps soient imberbes et inodores. Cette fragrance naturelle devenue gênante pour de nombreux individus constitue pourtant le plus subtil des parfums érotiques.

Éradiquer le poil vous dévoile comme de jeunes femmes ou de jeunes hommes. Être lisse amoindri la bestialité de l’acte sexuel, c’est l’innocence qui domine. Ôter les toisons, c’est infantiliser, réduire les aspérités humaines si spécifiques à chacun au profit d’un cadre plus strict et surtout plus hygiéniste de la sexualité. Les différences hommes-femmes sont atténuées. Il s’agit de génitaliser toujours un peu plus les rapports intimes. Sans poil, on visibilise l’ouverture, la béance, la taille, le diamètre. L’objectif est d’avoir davantage de pénétrance et de pénétration, à l’image de la pornographie actuelle. Le but est de voir et d’agrandir toujours plus. En se centrant uniquement sur la pénétration, l’érotisation se neutralise. Il y a une focalisation sur les zones érogènes “classiques” évinçant l’accès au plaisir diffus qu’offre un corps entier.

LES CONSÉQUENCES DE LA DISPARITION DU POIL

Ce qui paraît être un geste anodin est en réalité suivi de nombreuses conséquences néfastes :

  • Votre sensibilité aux caresses est moins détectable par votre/vos partenaire(s).
  • Vous enivrez inconsciemment moins votre/vos complice(s) sexuel(s) : certaines odeurs, dont la sécrétion est stimulée par des sensations et que les poils préservent provoquent l’abandon émotionnel et physique de votre/vos acolyte(s). Il s’agit d’un parfum naturel, essentiel qui entretient une intimité puissante, une osmose au-delà des diktats actuels.
  • La repousse est de plus en plus drue avec le temps alors que le poil permet de ressentir la douceur de deux mouvements de bassins (qu’ils soient lents ou intenses), d’accentuer le moelleux au toucher et de rendre plus tendre les baisers.
  • L’épilation peut effacer ce qui réside en chacun de vous : votre beauté, votre charisme, vos attraits sont surtout présents dans ce que vous allez offrir, partager, dégager (…) aux yeux de l’autre. La chasse aux poils n’y changera rien.
  • S’épiler ne fait que renforcer un idéal de canon de beauté : “pour être regardé(e) et aimé(e), il faut être net(te)”
  • S’épiler intégralement le sexe, c’est paradoxalement enlever du sexuel tout en montrant le sexe. Nombreux sont ceux qui refusent de faire l’amour si ils/elles ne se sentent pas “nickels”. Pourtant, rien n’est moins apprêté que le désir.
  • Le coût, le temps et la douleur que cela implique pourraient être utilisés pour rechercher d’autres schémas érotiques excitants. Il ne suffit pas d’être épilé(e) pour ressentir une envie sexuelle. Sans élan, sans séduction, une épilation ne reste qu’un artifice supplémentaire (pouvant certes être une source d’excitation mais se traduisant plutôt aujourd’hui comme une obligation afin d’éviter un rejet, des remarques désobligeantes…).